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Women in Finance | COO & Secrétaire Générale – Fanny Rodriguez

Avr 04, 2024 - 4 min read
Caroline Béguin, Copywriter at Sopra Banking Software

Je pense que toute diversité est positive et, féminiser un secteur, c’est le rendre divers. (…) Pour moi, l’avantage de la féminisation, c’est proposer de meilleures solutions. J’ajouterai que le marché est composé d’hommes et de femmes, donc la mixité ne me semble pas mal pour penser au client ; le client n’est pas forcément un homme, il peut être un homme ou une femme. 

Fanny Rodriguez – Directrice des Opérations & Secrétaire Générale chez Fintecture

Women in Finance, un contenu accessible au format Podcast

Au micro de Caroline Béguin, pour la voix française, et de Maya Lawrence, pour la voix anglaise, des experts se succèdent pour commenter les grandes tendances et actualités du secteur de la finance et de la tech. La série dédiée aux Women in finance s’inscrit dans un format conversationnel qui met à l’honneur le parcours et l’expertise métier d’une tête pensante du secteur de la finance.

Fanny Rodriguez, COO & Secrétaire Générale

Dans cet épisode, Fanny Rodriguez, Chief Operating Officer (COO) & Secrétaire Générale chez Fintecture mais aussi membre du Berlin Group, nous parle de ses domaines d’expertise. Elle revient notamment sur les anecdotes qui ont marqué sa vie de femme dans le secteur de la finance. Elle nous parle aussi du grand écart qu’elle a réalisé en passant d’un grand groupe au monde de la fintech, avant de nous confier comment sa nature passionnée et son authenticité lui ont permis de s’adapter, pour arriver où elle en est aujourd’hui.

Transcription du podcast

Introduction et parcours : mise en lumière du parcours unique de Fanny Rodrigues+

Caroline : « Women in Finance » est une série de podcasts mettant en lumière des femmes influentes du secteur financier. Ces femmes incarnent une vision, un parcours, et une fonction unique, offrant ainsi une perspective différente sur la finance en partageant des anecdotes sur leurs expériences et leurs compétences professionnelles. Je suis en compagnie de Fanny Rodrigues. Bonjour Fanny.

Fanny : Bonjour Caroline.

Caroline : Fanny, tu possèdes une riche expérience dans l’industrie financière, commencée en 2002 à l’Association Française des Marchés Financiers où tu étais chargée des affaires européennes et internationales. Ton travail chez Société Générale t’a permis de découvrir le secteur des paiements, en particulier l’interdépendance entre les paiements et les nouvelles technologies. À ce moment-là, tu as travaillé directement avec des fintechs sur le projet DSP2, qui consistait à développer des API pour permettre leur connexion aux comptes de Société Générale. Cette expérience t’a donné l’envie de poursuivre dans le domaine des paiements et de rejoindre Banking, Marseille (maintenant Bridge), avant de rejoindre Fintecture, une fintech indépendante proposant des solutions B2B sur un marché en pleine expansion. Ma première question, compte tenu de cette expérience variée dans l’industrie financière, est la suivante : quelle est la leçon la plus marquante que tu as apprise au cours de ta carrière ?

Fanny : Merci Caroline. Une des leçons les plus marquantes que j’ai apprise est l’importance de rester soi-même, quelle que soit la situation ou le poste occupé. Être authentique dans son entreprise, apprécier ce que l’on fait et apprécier toutes les interactions quotidiennes est, à mon avis, fondamental.

Transition des banques traditionnelles aux fintechs : défis et adaptations face aux crises économiques+

Caroline : Tu es passée d’un grand groupe comme Société Générale au monde des fintechs, avec Fintecture comme dernière expérience, et cela à un moment où les ressources financières sont moins abondantes en raison des récentes crises, telles que la pandémie de Covid-19 et l’inflation. Comment t’adaptes-tu à cette situation ? Comment vis-tu ce défi ?

Fanny : Je pense que le terme “s’adapter” est tout à fait approprié. Peu importe l’entreprise ou le secteur dans lequel on évolue, l’adaptation constante est nécessaire. Le monde évolue en permanence, et pour relever efficacement les défis, il faut accepter le changement et s’adapter aux circonstances. Quant à l’idée selon laquelle l’argent serait moins disponible dans les fintechs que dans les banques, je ne suis pas certaine que ce soit le cas. En tant qu’ancienne banquière, je peux affirmer que l’argent n’est jamais gratuit. Même au sein des banques, l’accès aux ressources financières n’est pas toujours aisé. De même, en dehors des banques ou dans les fintechs, l’obtention de financements n’est pas nécessairement plus difficile. Il y a toujours un coût associé à l’obtention de ressources financières, et le contexte économique actuel est similaire pour tous. Ainsi, que l’on travaille dans une banque ou dans une fintech, les défis restent les mêmes. Pour relever ces défis, il est essentiel de rester attentif à l’environnement économique et de répondre aux exigences du marché. Cela signifie adapter les priorités de l’entreprise en fonction de la situation économique. Par exemple, il y a eu une période où l’accent était mis sur l’investissement sans nécessairement se soucier de la rentabilité immédiate, ce qui, en tant qu’ancienne banquière, me semblait surprenant. Aujourd’hui, nous sommes incités à évaluer la rentabilité des produits avant d’investir, ce qui me semble plus sain. En fin de compte, il s’agit d’analyser attentivement les coûts et les bénéfices avant de développer de nouveaux produits.

Les solutions de Fintecture : Paiement par virement et services complémentaires pour les grandes entreprises+

Caroline : Fintecture est une fintech agréée en tant qu’établissement de paiement. Quel problème l’entreprise résout-elle ?

Fanny : Fintecture propose des solutions aux commerçants, principalement aux grandes entreprises telles que celles du CAC 40, comme Auchan ou Decathlon. Nous proposons une solution de paiement par virement, qui vient compléter les solutions existantes. Les commerçants nous font part de leur besoin : ils disposent déjà de moyens de paiement, mais plus ils peuvent proposer de solutions différentes à leurs clients, meilleures sont leurs chances d’être payés. En fonction des circonstances ou des préférences, les clients peuvent choisir tel ou tel moyen de paiement. Ainsi, les commerçants veulent offrir le plus large éventail possible de moyens de paiement. Nous leur proposons donc des solutions de paiement par virement, avec ou sans saisie d’IBAN selon leurs besoins, ainsi que du BNPL (Acheter Maintenant, Payer Plus Tard) avec une assurance associée, si nécessaire. Nous pouvons également vérifier l’identité de leurs clients. Nous offrons une variété de produits, que ce soit en matière de paiement, d’assurance ou de vérification d’identité, et nous nous adaptons à chaque client.

Évolution des habitudes de paiement en Europe : Adaptation rapide face aux changements réglementaires et sanitaires+

Caroline : En ce moment, l’Europe avance sur des textes qui vont bouleverser nos habitudes de paiement. Comment est-ce que nos habitudes de paiement vont-elles évoluer ?

Fanny : C’est une excellente question. On dit souvent que les habitudes de paiement évoluent lentement, mais dans le monde en constante évolution, rien n’est jamais certain. Nous avons vu avec la pandémie de Covid-19 que les habitudes de paiement peuvent s’adapter très rapidement. Pendant le Covid, nous avons recherché des moyens de paiement sans contact, comme les paiements sans contact par carte bancaire ou la solution de paiement Fintecture, qui ne nécessite pas de contact physique. Pendant le confinement, de nombreux commerçants ont ajouté la solution Fintecture à leurs services en ligne, offrant ainsi une alternative de paiement à distance à leurs clients. Les circonstances peuvent donc changer nos habitudes de paiement, parfois très rapidement. De plus, la Commission européenne cherche à favoriser la concurrence et l’innovation dans le domaine des paiements, comme en témoigne la série de textes proposée le 28 novembre pour dynamiser le marché des paiements et accompagner les transformations observées sur le marché.

Le développement de FinTechTur : Stratégies d’expansion tout en préservant l’agilité et la personnalisation+

Caroline : Ainsi, FinTechTur accompagne ces évolutions. En tant que secrétaire générale et directrice des opérations au sein de FinTechTur, comment aides-tu la FinTech à se développer ?

Fanny : Nous cherchons à nous structurer pour grandir tout en conservant notre ADN, qui repose sur l’agilité et la personnalisation des parcours pour nos clients. Nous nous efforçons d’avoir une vision globale de nos services et de nos départements, tout en restant aussi souples que possible pour répondre aux besoins changeants du marché et de nos clients. Par exemple, tous les trois mois, nous examinons notre organisation pour nous assurer qu’elle est adaptée à notre croissance et à notre présence dans cinq pays. Nous tenons à conserver notre agilité et notre flexibilité, qui sont des caractéristiques appréciées par notre clientèle.

Une journée atypique : La réalité imprévisible du travail de Fanny+

Caroline : Quelle est ta journée type, Fanny ? En as-tu une ?

Fanny : Il n’y a pas de journée type, c’est certain. Ce matin, je me suis réveillée en pensant que tout serait simple, que j’étais en avance sur tous mes dossiers et que les réunions de la semaine dernière s’étaient bien déroulées. Puis, j’ai reçu un appel m’annonçant l’absence prolongée d’un membre de mon équipe. Il a donc fallu s’adapter et tout réorganiser. Malgré cela, je reste confiante, car nous trouverons des solutions. Mais, honnêtement, je ne crois pas qu’il existe de journée type.

Vision de l’open finance : Engagement de Fanny avec le Berlin Group pour des normes européennes harmonisées+

Caroline : Tu travailles également avec le Berlin Group, qui œuvre pour le développement de l’interopérabilité des paiements. Quelle est ta vision de l’open finance ?

Fanny : En effet, j’ai toujours été très engagée auprès du Berlin Group et de ses travaux. Cela s’explique par mon intérêt pour l’Europe et ses diversités culturelles, qui m’ont conduit vers le secteur financier. Le Berlin Group incarne cette dimension européenne en élaborant des normes européennes adaptables aux 28 pays de l’Union européenne, quel que soit le secteur d’activité. Initialement conçus pour le secteur des paiements, ces standards pourraient également être utilisés dans d’autres secteurs comme les assurances, si nécessaire. J’ai eu la chance d’être dans une banque, la Société Générale, qui a adopté ces standards européens pour sa partie Wholesale, même si d’autres banques françaises ont opté pour des normes nationales comme les standards STED. Ce choix a été soutenu par Nicolas Cailly, le responsable de GTPS, qui a compris l’intérêt d’adopter des standards européens pour des paiements européens. Ces standards se sont développés et sont aujourd’hui utilisés dans plusieurs pays, offrant une approche apolitique et harmonisée pour accompagner l’Open Finance. Cette évolution va au-delà de l’Open Banking, incluant tous les secteurs liés de près ou de loin à la finance, tels que les assurances et les crédits immobiliers. Les standards harmonisés simplifient les échanges transfrontaliers, renforçant ainsi la sécurité et réduisant les coûts associés à la connectivité à 28 standards nationaux différents. Pour toutes ces raisons, j’ai toujours soutenu les travaux du Berlin Group.

Affirmation et évolution : Perspective de Fanny sur l’égalité hommes-femmes dans le secteur financier+

Caroline : Tu occupes un poste très en vue dans le domaine réglementaire. Comment t’affirmes-tu dans ce milieu largement masculin ?

Fanny : Je ne me suis jamais vraiment posé la question. J’ai toujours cherché à rester fidèle à moi-même. Bien sûr, j’étais consciente d’évoluer dans un environnement majoritairement masculin, une réalité dans le secteur financier où je me trouvais. Cependant, au lieu de chercher à m’affirmer spécifiquement en tant que femme, j’ai plutôt tenté de comprendre les codes et les dynamiques de ce milieu, ainsi que mes interlocuteurs, hommes ou femmes. Mon objectif était simplement de partager et de collaborer en restant authentique.

Caroline : Perçois-tu une différence dans la place des femmes entre les grandes entreprises et les fintechs ?

Fanny : Je ne suis pas certaine de percevoir une différence entre la place des femmes dans les grandes entreprises et celle dans les fintechs. En revanche, je constate une nette évolution, source d’optimisme pour moi, entre les générations plus anciennes et les plus récentes. Me situant moi-même dans une génération intermédiaire voire plus ancienne, je peux témoigner de cela. Dans les générations précédentes, l’égalité hommes-femmes n’était pas acquise et certaines femmes ont dû se battre pour la promouvoir. Lorsque je suis passée d’une grande banque à une fintech, j’ai constaté un véritable changement générationnel. L’âge moyen dans les banques n’est pas le même que dans les fintechs. Dans la fintech où j’ai travaillé, la moyenne d’âge était de 30 à 35 ans, et j’étais souvent la plus âgée. J’ai été agréablement surprise par cette nouvelle génération pour qui l’égalité est intégrée et naturelle. Lorsqu’une femme annonce sa grossesse, elle est sincèrement félicitée. De même, lorsqu’un homme annonce qu’il prendra un congé paternité, on lui demande simplement combien de temps il envisage de prendre, sans que cela ne pose de problème. Cette égalité est devenue évidente pour la nouvelle génération, contrairement aux générations précédentes. Ainsi, la différence que je perçois n’est pas tant entre les secteurs que entre les générations, et elle va dans le sens positif. Cela est très rassurant et prometteur pour l’avenir.

Caroline : Pourquoi, selon toi, y a-t-il si peu de femmes occupant des postes clés dans la finance ?

Fanny : C’est une excellente question, à laquelle je me suis de plus en plus confrontée au fil de ma carrière. À l’origine, le domaine financier était plutôt mixte, avec une proportion d’environ 60-40 entre hommes et femmes, ce qui n’était pas négligeable. Cependant, j’ai observé qu’à mesure que l’on gravit les échelons, le nombre de femmes diminue. Parfois, je me retrouve même être la seule femme. Cette réalité me pousse à me demander : où sont passées les femmes ? Au départ, bien qu’elles fussent moins nombreuses, elles étaient présentes. Je crois que les femmes se censurent souvent, qu’elles n’osent pas s’affirmer comme le font leurs homologues masculins. On dit souvent qu’une femme ne postulera que si elle estime déjà posséder toutes les compétences requises, alors qu’un homme postulera en pensant qu’il pourra acquérir ces compétences au fur et à mesure. Ce phénomène, appelé syndrome de l’imposteur, m’a parfois également touchée. Je me suis demandée si j’étais vraiment à ma place. Pourtant, je pense que hommes et femmes sont complémentaires, même s’ils ont des approches différentes. Il s’agit de savoir s’ouvrir aux autres tout en restant soi-même, en restant une femme. La question de savoir si l’on souhaite changer ou non, rester authentique ou évoluer vers autre chose, est une interrogation que nous nous posons tous. Mais l’essentiel est de rester fidèle à soi-même, tout en restant ouvert aux autres et en reconnaissant que d’autres codes peuvent s’appliquer à certains moments. J’espère que la nouvelle génération poursuivra sur cette lancée et que nous parviendrons finalement à la parité.

L’avantage de la diversité : Les bénéfices de la féminisation du secteur financier+

Caroline : Quels avantages perçois-tu dans la féminisation du secteur ?

Fanny : Je suis convaincue que la diversité est un atout majeur, et donc, féminiser un secteur revient à le rendre plus diversifié, en y incluant des hommes et des femmes. Les études le confirment : des équipes diversifiées produisent de meilleurs résultats. Hommes et femmes sont différents, et je ne suis pas d’accord avec l’idée selon laquelle nous fonctionnons de la même manière. Nos parcours éducatifs sont différents, nos enjeux ne sont pas les mêmes : les femmes portent les enfants, les hommes non. Je pense que féminiser le secteur financier, c’est donc lui apporter une diversité qui enrichira les solutions proposées. Bien sûr, je reconnais que cela peut être difficile pour un groupe d’hommes d’accueillir des femmes, tout comme pour un groupe de femmes d’accueillir des hommes. Mais finalement, travailler ensemble est plus exigeant, mais c’est aussi plus enrichissant. Ainsi, pour moi, l’avantage de la féminisation réside dans la proposition de meilleures solutions. De plus, le marché est constitué d’hommes et de femmes, il est donc judicieux d’avoir une mixité pour mieux répondre aux besoins de la clientèle, qui peut être aussi bien masculine que féminine.

Expériences de discrimination : Le défi des congés maternité dans la carrière de Fanny+

Caroline : As-tu déjà été victime de discrimination ?

Fanny : Eh bien, je dois dire que c’est une question intéressante. Si je devais être honnête, je dirais que j’ai vécu des deux côtés. Pour ce qui est du côté positif, j’ai été aidée par de nombreux hommes tout au long de ma carrière, et je suis reconnaissante envers eux. Évoluant dans un milieu majoritairement masculin, leur soutien a été précieux. Mais j’ai aussi été confrontée à des discriminations négatives. L’expérience la plus marquante a été liée à mes deux congés maternité. J’ai remarqué que durant l’année précédant mon congé, pendant le congé lui-même, et lors de mon retour, cela a eu un impact sur ma carrière. Il faut une volonté considérable pour effacer ces trois années, pour revenir et se réaligner sur les standards masculins. Pour être franc, lorsqu’on a un deuxième enfant, le cycle recommence : trois nouvelles années de rattrapage sont nécessaires. Certaines femmes de mon entourage me demandaient pourquoi je n’avais pas abandonné. Elles trouvaient cela impossible et trop difficile. Alors pourquoi persévérer ? Par passion, c’est ce qui m’a permis de tenir bon. Mais je dois avouer que six années pour deux enfants, c’est un prix élevé à payer. J’ai clairement ressenti cela comme de la discrimination. On constate qu’avec un diplôme équivalent, avant d’avoir des enfants, les femmes ont le même salaire et le même poste que les hommes. Mais après un congé maternité, il y a un décrochage. Il faut se battre, presque être meilleur que les hommes, pour justifier ce rattrapage. C’est la même histoire pour le deuxième enfant. Je n’ose imaginer celles qui en ont trois ou quatre. Trois années par enfant, c’est vraiment compliqué. Donc voilà, il y a deux côtés : le soutien positif des hommes, ouvert ou plus discret, que l’on remarque parfois après coup, et pour lequel je leur suis reconnaissante, et puis il y a le côté beaucoup plus négatif. J’espère sincèrement que les jeunes générations, peut-être avec l’allongement du congé paternité, auront une expérience plus positive. Et sinon, je serai là pour les soutenir.

Inspiration et modèles : L’influence de figures féminines dans la carrière de Fanny+

Caroline : Est-ce qu’il y a des modèles d’hommes ou de femmes qui t’ont inspirée ?

Fanny : Réfléchissant récemment à cette question, je me suis rendu compte que l’on est souvent tellement pris dans nos vies quotidiennes que l’on ne prend pas toujours le temps de s’arrêter et de réfléchir à cela. Mais en y pensant, une femme m’a particulièrement guidée, c’est Christine Lagarde. Son parcours dans le secteur financier, en tant qu’ancienne ministre et actuelle présidente de la BCE, est remarquable. Elle parle couramment anglais, ce qui semble être tout à fait normal, mais ce n’est pas si courant à son niveau. Elle ouvre la voie et montre que c’est possible, même si on ne prétend pas nécessairement atteindre le même niveau. Cela nous fait penser que si elle a pu le faire, alors pourquoi pas nous, à notre échelle modeste ? Il y a aussi d’autres personnes moins connues, mais qui ont eu un impact sur moi sans que je m’en rende compte à l’époque. Par exemple, Bourcha Quinel, qui était présidente de l’association européenne des bourses à Bruxelles. Dans un domaine souvent masculin comme celui des bourses, voir une femme occuper un tel poste m’a ouvert les yeux sur les possibilités qui s’offrent à nous. Chaque personne, qu’elle soit connue ou non, peut servir de modèle à sa manière et ouvrir des voies nouvelles.

Conseils pour les débutants : Faire ses propres choix tout en écoutant les autres+

Caroline : Et à ton tour, quels conseils est-ce que tu donnerais à un jeune homme ou à une jeune femme en début de carrière ?

Fanny : Je trouve un peu prétentieux de prétendre donner des conseils, alors je vais simplement partager mon expérience. Je pense qu’il est essentiel d’écouter les personnes autour de soi et de recueillir différents avis. Je crois beaucoup en l’intelligence collective. Donc, il est important de prendre en compte un maximum d’avis, mais ensuite, il faut prendre ses propres décisions en toute lucidité. Ne laissez jamais quelqu’un d’autre décider à votre place, car vous vous connaissez mieux que quiconque. Il est crucial de décider par vous-même, en étant conscient de vos compétences, de vos forces et des points que vous devez encore développer. Ne prétendez pas pouvoir tout faire dans tous les domaines à tout moment, car cela relève de l’illusion. Il est préférable de se concentrer sur ce que vous voulez à un moment donné, de prendre une décision et de vous y engager pleinement. Donc, écoutez les autres, mais prenez vos propres décisions, et surtout, ne laissez personne d’autre que vous-même décider à votre place. Personnellement, j’ai eu la chance de suivre mon propre chemin, et je ne le regrette pas. Même en cas d’échec occasionnel, ce n’est pas grave. L’important est de prendre des décisions et, si nécessaire, de se relever et de continuer. Les Américains le font très bien, les Français ont parfois un peu plus de mal avec ça, mais l’essentiel est de rester fidèle à soi-même en toutes circonstances.

Perspectives sur l’ambition : Faire ce qu’on aime et contribuer de manière positive+

Caroline : Pour en arriver là où tu en es aujourd’hui, il faut de l’ambition, qu’est-ce que c’est l’ambition pour toi ?

Fanny : Je ne suis pas sûre qu’il faille nécessairement de l’ambition, mais je dirais que ce terme est souvent connoté de façon négative en France, ce que je trouve dommage. Pour moi, l’ambition consiste simplement à faire ce que l’on aime. En France, cela peut parfois susciter des jalousies, mais pour ma part, je fais simplement ce qui me passionne. Je n’ai jamais délibérément visé un niveau ou un poste spécifique. Ce que j’aime, c’est apprendre au quotidien, et j’espère continuer à apprendre le plus longtemps possible. Pour moi, l’ambition est simplement le désir de faire ce que l’on aime et de ne pas vouloir s’arrêter, car cela nous rend heureux. J’espère également que ce que je fais peut être utile aux personnes qui m’entourent, que cela contribue à construire quelque chose de positif. Par exemple, dans mon entreprise, j’espère que mon intérêt pour les textes européens et ma volonté de construire des consensus peuvent aider à avancer, même si je comprends parfaitement que tout le monde n’apprécie pas ces aspects. L’important, c’est que chacun puisse se concentrer sur ce qu’il aime et contribuer avec le meilleur de lui-même à des solutions solides.

Caroline : Merci Fanny pour cet entretien très riche, et je te souhaite une excellente journée.

Fanny : Merci beaucoup, Caroline. À bientôt.