Après une phase d’apprentissage des crypto monnaies, l’émergence d’un nouvel écosystème financier décentralisé interroge les banques. La blockchain se retrouve de nouveau sous les feux de l’actualité.
En 2011/2012, les médias commencent à parler de cryptomonnaies et le terme « bitcoin » fait son apparition dans le langage courant. Ces actifs numériques, sécurisés par des algorithmes cryptographiques, court-circuitent les banques traditionnelles. Elles s’apparentent à des monnaies digitales et circulent en dehors du circuit financier.
Face à ces devises électroniques en plein essor, les banques centrales réagissent et expérimentent les CBDC (Central Bank Digital Currencies) qui sont des crypto monnaies adossées à une monnaie fiat. Ce mouvement de fond témoigne d’une certaine maturité qui explique en partie le développement en parallèle d’un écosystème autours de la finance décentralisée – la DeFi.
Qu’est-ce que la DeFi ?
Comme l’expression le suggère, la finance décentralisée s’appuie sur le principe de décentralisation propre aux cryptomonnaies et l’étend à tout l’écosystème de la finance.
Actuellement, les banques sont dépositaires de fonds et organisent les échanges. Les services bancaires, qu’il s’agisse de crédit, de prêts, ou d’assurances, sont donc centralisés. Les partenaires et les intermédiaires doivent être rémunérés et pour avoir accès à ces services, il faut répondre aux critères demandés et disposer de temps. La finance décentralisée permet de se passer des intermédiaires et selon le produit visé donne accès à un meilleur taux ou un meilleur rendement. Le principe de la DeFI est d’offrir un accès direct au système financier accessible à tous. Il n’est alors plus nécessaire de disposer d’un compte, les critères d’accès sont beaucoup plus souples et l’accès est très rapide.
Par nature, une blockchain offre une certaine transparence et beaucoup d’informations sont ainsi librement accessibles. Cela permet aux consommateurs de s’émanciper du système actuel sur lequel ils n’ont que peu de contrôle. La DeFi offre ainsi un potentiel séduisant face aux banques traditionnelles en proposant des services classiques comme plus innovants et en ouvrant les portes du monde financier de façon inédite.
Les limites du système
La finance décentralisée reste toutefois un système récent dont il faut comprendre les limites. Cette approche encore jeune, s’appuie sur une technologie qui inaugure un secteur pas encore régulé, manquant de contrôles et, par conséquent, n’offrant pas de recours en cas de problème. D’où quatre difficultés que pose ce nouveau système :
- La protection des utilisateurs. Lorsque les banques sont l’intermédiaire principal, elles offrent à leurs clients des garanties de sécurité. La finance décentralisée n’ayant pas de corps central, elle présente des risques pour la sécurité et la fraude. Selon CipherTrace, entre janvier et avril 2021, 156 millions de dollars ont été volés dans des piratages liés à la DeFi.
- La stabilité. Tout comme la plupart des cryptomonnaies, la finance décentralisée s’émancipe des banques centrales, ce qui pose la question de la stabilité de la valeur monétaire des cryptomonnaies employées. Celles-ci, on l’a vu récemment avec le bitcoin, peuvent connaître des variations importantes en peu de temps.
- La régulation. Le système financier et bancaire actuel est soumis à de nombreuses régulations, en matière de protection des données, comme de sécurisation des transactions. La DeFi y échappe pour l’instant pour différentes raisons car malgré des montants de plus en plus importants, ce secteur est encore assez peu connu du grand public. Or, s’il est tentant de s’émanciper des intermédiaires, ceux-ci offrent des garanties non-négligeables.
- La mise en place. En pratique, il est difficile de se passer complètement d’intermédiaires ne serait-ce que pour offrir ces services qui requièrent des équipes et des fonds.
Quelles sont alors les perspectives pour le secteur bancaire ?
Pour les banques, il ne s’agit pas de rejeter en bloc la finance décentralisée ni d’en faire son activité première. Une possibilité serait par exemple de prendre des parts sur ce marché naissant. Si on pense aux CBDC (monnaies digitales de banques centrales), l’ère des cryptomonnaies pourrait arriver plus vite qu’on ne l’imaginait !
La popularité de la DeFi, dont la valeur totale verrouillée (TVL) a été multipliée par 88 en un an, montre déjà que les clients sont à la recherche d’un système plus souple, plus avantageux et moins contrôlé. Elle amorce des changements dans le secteur et laisse entrevoir de nouveaux chemins pour la finance.